EXPROPRIATION POUR CAUSE D’UTILITE PUBLIQUE ET INDEMNISATION DE L’EXPLOITANT AGRICOLE 

Dans le cadre d’une opération d’expropriation pour cause d’utilité publique, le propriétaire et le preneur rural peuvent être une seule et même personne et peuvent donc cumuler plusieurs types d’indemnisation. Si ce n’est pas le cas, l’exploitant a néanmoins un droit propre à être indemnisé des conséquences de l’expropriation.


Le propriétaire, en application de l’article L311-2 du code de l’expropriation doit faire connaître à l’expropriant, les fermiers et locataires ayant un droit d’occupation des terres. L’expropriant est alors tenu de notifier une offre d’indemnisation. À défaut, il peut être mis en demeure de le faire. (art. R 311-7 du code de l’expropriation). Si un accord ne peut être trouvé, le juge de l’expropriation sera saisi à l’initiative de l’une ou l’autre des parties.


Nous ne détaillerons pas ici la procédure en elle-même. Il s’agit de préciser les principaux chefs d’indemnisation de l’exploitant évincé. Le transport sur les lieux du juge de l’expropriation sera un moment privilégié pour indiquer les points favorables des parcelles expropriées et l’impact de l’expropriation sur le devenir de l’exploitation : une perte de qualité de la terre, de superficie, une situation géographique différente avec parfois un éloignement par rapport au siège de l’exploitation, dommages aux cultures et aux sols du fait de l’expropriation, etc…


Deux dates sont importantes :

- Celle de l’ordonnance d’expropriation qui éteint les droits liés au bail rural ;

- Celle de la date de référence : date à laquelle l’usage effectif du bien exproprié est déterminé. ( en principe un an avant l’ouverture de l’enquête publique) .


Prouver l’existence d’un titre d’occupation sur les parcelles

Il arrive que l’accord propriétaire/locataire soit verbal. L’exploitant devra alors prouver sa qualité de preneur rural. Une attestation de bail verbal, un extrait Kbis du RCS, le relevé d'exploitation, la déclaration PAC, les appels de fermages et les relevés de comptes justifiant leur paiement sont autant de documents établissant l’existence d’un bail rural qui se définit comme la mise à disposition d’un bien à titre onéreux et en vue d’exercer une activité agricole.


L’exploitant peut alors revendiquer l’application de l'article L 321-1 du code de l’expropriation posant un principe d'indemnisation couvrant l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation.


Les bases de l’indemnisation

Le juge de l’expropriation se réfère aux accords amiables passés dans un même secteur et aux protocoles d’accord départementaux entre les chambres d’agriculture et les services fiscaux qui fixent des barèmes d’indemnisation.


L’exploitant peut donc percevoir :

- Une indemnité principale d’éviction qui, si elle s’appuie sur un protocole départemental, résulte de la marge brute d’éviction annuelle fixée à l'hectare et sur une certaine durée : 4 années environ, à moins de pouvoir proposer un calcul fondé sur la marge brute réelle de l’exploitation.

- Des indemnités de fumures et arrières-fumures (dues en raison de l’amélioration apportée aux terres du fait de leur exploitation continue) en général fixées par le protocole départemental à l’hectare.

- Des indemnités accessoires résultant des conséquences de la rupture anticipée du bail rural faisant perdre les avantages du statut de fermier, notamment le droit à renouvellement du bail. Ces indemnités peuvent concerner :

- La perte d’une situation privilégiée et/ou l’éloignement par rapport au siège de l’exploitation, notamment en cas d’expropriation partielle .

- La perte d'une clôture. À noter que ne sera pas indemnisée en sus la reconstitution d’une clôture sur un nouveau site d’exploitation mais en revanche n’est pas appliqué de coefficient de vétusté.

- La perte de points d’eau : mares ou puits.

- Celle de l’usage de bâtiments : hangars , écuries.

- Les dégâts aux cultures, voire la perte de récoltes et les dégâts aux sols, lesquels peuvent recouvrer plusieurs périodes notamment quand sont pratiquées des fouilles archéologiques avec trouées de sondage, traces de passage d’engins.

- En cas d’expropriation partielle, le fait que le fermier ne puisse plus exploiter la surface résiduelle dans des conditions normales.

 

L’exploitant agricole devra rapporter la preuve de ses préjudices par tous moyens. Il importe donc de conserver devis, factures, photographies venant appuyer ses dires outre un éventuel recours à des témoignages ou constats par un commissaire de justice afin de disposer d’un solide dossier.

Share by: